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Afrique du Sud : les lesbiennes, victimes du "viol thérapeutique"

lundi 25 mai 2009

L’Afrique du Sud avait donné un exemple au monde en instituant dans sa constitution et dans la loi l’égalité entre les citoyens et citoyennes, toutes orientations sexuelles confondues. Un rapport d’Action Aid révèle que les lesbiennes sont les fréquentes victimes de brutalités et de viols malgré les garanties constitutionnelles censées les protéger.

L’Afrique du Sud avait donné un exemple au monde en instituant dans sa constitution et dans la loi l’égalité entre les citoyens et citoyennes, toutes orientations sexuelles confondues. La constitution du pays proscrit toute discrimination sur la base de l’orientation sexuelle, et en 1996, l’union entre personnes du même sexe est devenue légale. L’expérience des personnes vivant hors du cadre de l’hétéronomativité parle d’une réalité tout autre.

Un rapport d’Action Aid révèle qu’en Afrique du Sud les lesbiennes sont les fréquentes victimes de brutalités et de viols malgré les garanties constitutionnelles censées les protéger. Chaque jour, dans le pays, des lesbiennes et des transsexuelles sont violées, torturées et soumises à des formes diverses de violence et d’humiliation.

Le rapport confirme que les lesbiennes en Afrique du Sud sont fréquemment violées par des hommes, pour les « guérir » de leur lesbianisme. Les femmes qui ont été assez courageuses pour parler ouvertement de leur sexualité ont été agressées. Tel fut le cas de :

- Sizakele Sigasa et sa compagne Salome Massooa qui après avoir été insultées, ont subi un viol collectif, ont été torturées et assassinées en 2007 ;

- Zoliswa Nkonyana de Khayelitsha, au Cap, âgée de 19 ans, qui a été lapidée par la foule devant chez elle en 2006 ;

- Eudy Simelane, de 31 ans, ex- membre de l’équipe nationale de football, habitant l’un des townships de Johannesburg, a été violée et assassinée.

De nombreuses lesbiennes sont les cibles de la violence masculine, incluant l’assassinat, le viol, le passage à tabac et autres formes d’humiliation et d’asservissement, et ce en Afrique du Sud comme dans le reste du monde. La différence est que, contrairement à ce qui se passe dans d’autres pays du point de vue légal, la discrimination en raison de l’orientation sexuelle est explicitement proscrite par la constitution sud-africaine.

Le Parlement a même promulgué une loi – la première en Afrique - permettant le mariage entre personnes du même sexe.

En Afrique du Sud, la loi devrait donc protéger tous les membres de la société quelle que soit leur orientation sexuelle, or la situation réelle est bien différente, voire opposée. Selon le rapport d’Action Aid, seul 20 % des cas de « viol thérapeutique » est porté devant les tribunaux, avec une condamnation à la clef dans seulement 4 % des affaires.

Il est évident que la police est plus que laxiste en la matière et que, pas plus que les tribunaux, elle ne prend au sérieux ces « viols thérapeutiques », en tout cas jamais considérés comme des crimes haineux. En dépit de la loi, les crimes perpétrés contre des individus qui expriment ouvertement des formes d’orientation sexuelle en contradiction avec les normes hétérosexuelles, ne font pas l’objet d’enquêtes ni de poursuites vigoureuses.

La situation sud-africaine telle que dépeinte dans le rapport, met en évidence l’abîme existant entre la loi, ses dispositions et leur application, entre le niveau de volonté législative et celui de transformation de l’éthos social. Dans plusieurs cas, des lesbiennes qui ont été violées racontent que c’est victimes de la duplicité de proches, amis ou parents, qu’elles se sont retrouvées dans les circonstances où l’agression a été commise.

Le viol « thérapeutique » est souvent l’antichambre du meurtre ; on peut donc s’interroger sur les motivations des violeurs, leurs intentions curatives ou correctives ne seraient-elles pas plutôt un projet d’élimination radicale des lesbiennes.

Le rapport fait état des excuses données par les hommes ayant violé des lesbiennes. La justification première est de tenter de « guérir » les femmes du lesbianisme, ce qui sous-tend l’idée qu’une seule forme de sexualité est acceptable : l’hétérosexualité, et que toute autre manifestation est du domaine de l’anormal et doit donc être exorcisée. Pourtant, la constitution d’Afrique du Sud reconnaît et protège les individus qui ne sont pas hétérosexuels. Le fossé entre la loi et la réalité est vaste et profond.

Selon le rapport de Action Aid, les actions suivantes devraient, entre autres, être mises en œuvre par le gouvernement sud-africain, afin de faire de l’égalité une réalité :

- Défendre la constitution du pays et ses lois qui protègent les personnes homosexuelles, bi, trans et intersexuelles et garantissent leur dignité ;

- Souscrire à la déclaration des Nations unies sur l’orientation sexuelle et l’identité de genre.

- Assurer aux victimes de violence sexuelle les compensations adéquates.

La loi sud-africaine, malgré les imperfections de son application, reconnaît l’égalité des droits entre citoyens, hommes et femmes, quelle que soit leur orientation sexuelle. Le défi consiste à faire évoluer les mentalités pour les mettre à l’unisson des aspirations que reflète la constitution du pays.


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Sources : AWID


Pour télécharger le rapport :
Rapport d’Action Aid sur les viols thérapeutiques en Afrique du Sud