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Côte d’Ivoire : une jeune fille de 12 ans violée par dix casques bleus

mardi 24 juin 2008

Les abus sexuels commis par les soldats de l’ONU et les travailleurs
humanitaires restent impunis. Une ONG dénonce. Et appelle la communauté internationale à agir enfin.

« Ils m’ont attrapée, jetée à terre, violée l’un après l’autre. Je voulais
m’enfuir, mais ils étaient dix. J’étais terrifiée. Quand ils ont terminé,
ils m’ont abandonnée là, baignant dans mon sang... »
Elisabeth n’avait que 12 ans, en juin dernier, lorsque son chemin a croisé celui des Casques
bleus pakistanais. Pour son plus grand malheur. Les soldats de l’ONU
effectuaient une mission de « maintien de la paix » en Côte d’Ivoire. Dans le
village de la fillette, on affirme que les militaires n’ont jamais été
inquiétés.

Le récit bouleversant d’Elisabeth n’est qu’un des trop nombreux témoignages
recueillis par l’ONG britannique Save The Children au cours des douze
derniers mois. A en croire le rapport publié hier, des abus sexuels sont
commis régulièrement par des Casques bleus, mais aussi par des travailleurs
humanitaires.

Il ne s’agit pas toujours de viols. Affamés, des enfants sont contraints de
vendre des faveurs sexuelles contre de la nourriture ou du savon dans des
zones dévastées par la guerre ou des catastrophes naturelles. Surtout en
Côte d’Ivoire et en Haïti. Les petites victimes ont parfois à peine 6 ans !
« Notre enquête met au jour les actes ignobles d’un petit nombre de
personnes qui abusent les enfants les plus vulnérables au monde, qu’ils
sont supposés protéger »
, dénonce à Londres la directrice de Save The
Children, Jasmine Whitbread. L’ONG affirme qu’on trouve de tels
« prédateurs » dans toutes les organisations.

L’Afrique à vendre ?

Elle estime que les politiques de « tolérance zéro » n’ont pas été traduites
sur le terrain. L’impunité serait totale. C’est pourquoi Save The Children
appelle d’urgence les acteurs internationaux à faciliter le dépôt de
plaintes, afin de pouvoir sanctionner sévèrement les coupables et apporter
un soutien aux victimes...

« Déposer plainte ? Mais la plupart des victimes ne le feront jamais ! Les
abuseurs sont ceux dont elles dépendent pour se nourrir »
, objecte un
humanitaire onusien sous le couvert de l’anonymat. « La vérité, c’est qu’il
faut être extrêmement solide pour faire ce boulot. Vous n’imaginez pas
comme la tentation est forte. Le continent noir est si vulnérable... Toute
l’Afrique est à vendre ! Dans les zones d’intervention internationale, les
gens sont traumatisés. Les pires abus sont commis à l’intérieur même des
familles et des communautés. Il n’y a plus ni bien ni mal. Alors si les
Casques bleus n’ont pas une sérieuse formation aux droits de l’homme, s’ils
n’ont pas été choisis pour leur droiture, s’ils ne sont pas régulièrement
envoyés en « décompression » dans une grande ville où ils peuvent accéder à
la prostitution « légale », alors certains succombent à leurs pires
fantasmes. »

« Quant aux humanitaires, ne les croyez pas à l’abri de leurs pulsions ! »
poursuit notre interlocuteur. « Les internationaux gagnent 15 à 20 fois plus
que leurs collègues locaux, qui comptent pour 90% des employés. Ceux-ci sont
recrutés au sein de cette population traumatisée. Ils sont engagés sur des
contrats de courte durée. L’avenir n’est jamais assuré. Pour beaucoup, la
motivation humanitaire est secondaire, la corruption banalisée et le vice à
portée de main. Voilà les problèmes à résoudre. Il serait temps de les
affronter. »

***

Source  : Tribune de Genève