Au cours de la plénière de samedi matin, le Pr Hakima Himmich, présidente de l’Association marocaine de lutte contre le sida (ALCS) et membre du conseil d’administration de Sidaction, a dénoncé l’hypocrisie moralisatrice qui sous-tend les stratégies de prévention dites ABC (« abstinence, be faithful, use a condom » - abstinence, fidélité et préservatif). Comment s’abstenir, en effet, quand la sexualité est le théâtre de violences physiques et symboliques ? Comment croire que la fidélité est protectrice, quand elle n’est respectée que par les femmes ?
Pourtant, paradoxe seulement apparent, les femmes ont un meilleur accès aux ARV et à un suivi médical : 58 % des personnes vivant avec le VIH bénéficiant d’un traitement sont des femmes. Une recherche menée au Sénégal sous la direction du Pr Alice Desclaux (IRD) a montré que les hommes sont plus réticents à se faire dépister et à accéder à des services de soins. Pourquoi ? Notamment parce qu’ils considèrent qu’il est dégradant de se confier au personnel soignant, parce qu’ils craignent qu’une éventuelle découverte de séropositivité ne remette en cause trop fondamentalement leur rôle de
chef de famille ou, tout simplement, parce qu‘ils refusent de partager un espace d‘attente avec des femmes dans les services de santé.
Les inégalités de genre frappent aussi les hommes, donc, mais en dernière instance ce sont encore les femmes qui en subissent les conséquences : souvent seules à se faire tester, elles subissent la stigmatisation de l’entourage si elles découvrent une séropositivité et ne peuvent pas se protéger efficacement car elles ignorent le statut sérologique de leur partenaire. Rappelons à ce propos que plus des quatre cinquièmes des nouvelles infections par le VIH chez les femmes sur-
viennent dans le cadre du mariage ou de relations à long terme.
Veronica Noseda,
chargée de mission en sciences sociales, Sidaction.